La Vertu au 14ème degré R.E.A.A. : comment est-elle abordée ? En quoi consiste-t-elle ? Comment la définir ?
La Vertu est le thème central du quatorzième degré. Elle accompagne le franc-maçon dans le succès comme dans l’épreuve.
La Vertu est ainsi décrite :
Le Temple étant achevé, Salomon reçut les plus vertueux des Chevaliers de Royal-Arche et les investit du degré de Perfection.
Il leur fit jurer solennellement de vivre en paix, union et concorde entre eux, de pratiquer les devoirs de charité, de bienveillance, à l’imitation du Respectable Maître Hiram, et de faire en sorte qu’à son image, la justice et l’équité soient toujours le fondement de leurs actes.
Il leur fit promettre encore de s’assister mutuellement dans le besoin, de punir sévèrement la trahison, la perfidie et l’injustice. Puis, il les bénit et leur dévoila l’Arche d’Alliance.
Salomon ordonna ensuite de nombreux sacrifices et admit les postulants à une sainte libation.
Il les embrassa et remit à chacun d’eux un anneau d’or en signe de l’alliance qu’ils avaient contractée avec la Vertu et les hommes vertueux.
Ainsi, les Grands Elus sont ceux qui ont « contracté une alliance avec la Vertu et les hommes vertueux ». Il s’agit bien d’un contrat, ce qui implique des devoirs et une vigilance de chaque instant. Précisément, le mot « vertu » vient du latin virtus qui signifie « énergie morale, force ».
Double-alliance, donc :
- d’une part avec la Vertu, prise dans son aspect le plus sacré et divin : on pense aux trois vertus théologales que sont la foi, l’espérance et la charité,
- d’autre part avec les hommes vertueux, alliance qui relève cette fois de l’action au quotidien : on pense aux quatre vertus cardinales que sont la prudence, la tempérance, la force d’âme et la Justice.
Autrement dit, il s’agit d’une alliance avec Dieu, et d’autre part avec les hommes de bonne volonté, les deux aspects étant liés.
Voici donc une planche sur la vertu au 14ème degré.
Voir aussi notre liste de planches au 14ème degré R.E.A.A.
La vertu au 14ème degré R.E.A.A. : interprétation
D – Quel sentiment anime les Grands Élus, Parfaits et Sublimes Maçons ?
R – L’amour de la Vertu.
Le quatorzième degré est un aboutissement, presque une consécration : le franc-maçon a atteint la Vertu en ce sens qu’il a compris et intégré tous les enseignements des degrés précédents. Il est humble (4ème degré), épouse les valeurs de Maître Hiram (5ème degré), se montre zélé (6ème degré), équitable (7ème degré), charitable et fidèle (8ème degré), intransigeant (9ème degré), juste (10ème degré), vrai (11ème degré), clairvoyant (12ème degré) et courageux (13ème degré).
Il pratique le bien, accomplit son devoir et se conforme à son idéal moral. En ce sens, il s’approche des qualités du roi Salomon et d’Hiram-Abi.
La Vertu peut être abordée comme un alignement parfait : en se mettant au service de ses frères, le franc-maçon se met au service de Dieu. En pratiquant la Justice, il reflète la Justice divine. En se montrant charitable, il incarne l’Amour du Grand Architecte de l’Univers. Cet alignement n’est autre que la voie du coeur, une énergie rayonnante qui unit pensée et action.
Le rituel du quatorzième degré donne des compléments de définition au sujet de la Vertu :
D – Quelles doivent être les dispositions d’un Grand Élu, Parfait et Sublime Maçon ?
R- Il doit fermer son cœur à tout sentiment d’iniquité, de vengeance ou d’injustice. Il doit être toujours prêt à faire le Bien.
La vertu est donc synonyme de « Bien », mais aussi de résistance et de retenue, en particulier face à soi-même. L’homme vertueux mène une lutte intime. Parvenu à la paix intérieure, il se comporte de manière équilibrée envers lui-même et envers les autres.
Un exemple de vertu : Galaad
La vertu est un bien fragile : la décadence du roi Salomon, jusque-là « si sage et si vertueux », en est l’exemple-type.
A l’inverse, au quatorzième degré, un Grand Elu se distingue par son courage et sa vertu : il s’agit de Galaad.
Là, ils cherchèrent avec ardeur jusqu’à ce qu’ils découvrent le triangle d’or scellé sur la pierre d’agate. Ils trouvèrent aussi le corps de Galaad, fils de Sophronie, le chef des Lévites et l’un des plus influents des Grands Élus, Parfaits et Sublimes Maçons.
(…)
Galaad était le gardien de la Voûte Sacrée ; il prenait soin que des lampes restent toujours allumées. Il adorait et contemplait le Nom Ineffable.
Il fut l’égal d’Hiram Abi qui, quelque quatre cents ans plus tôt, avait perdu la vie pour ne pas dévoiler le secret des Maîtres. Galaad choisit d’être enseveli sous les ruines du Temple plutôt que de révéler par sa fuite l’existence du précieux Trésor qui serait alors tombé aux mains des Barbares.
Par sa dévotion et son sens du sacrifice, Galaad est l’égal d’Hiram-Abi. Il est l’exemple même de la Vertu qui, loin d’être une somme de valeurs abstraites, prend corps dans l’épreuve.
Galaad est à la fois grand-prêtre et valeureux chevalier. Chef des Lévites, il adore et contemple le Nom ineffable, signe qu’il est en communion avec l’idée qui sous-tend le symbole du Grand Architecte de l’Univers.
Face à l’adversité, il ne fuit pas, choisissant d’affronter la mort plutôt que de livrer les secrets à l’ennemi. Il est l’image du preux chevalier. A noter que dans la légende arthurienne, Galaad, fils de Lancelot, est le chevalier qui accomplit la quête du Graal. Il prend place à la Table ronde à la droite du roi Arthur, sur le « siège périlleux », place de tous les dangers.
Au final, la Voûte sacrée devient le tombeau de Galaad, comme la Chambre du Milieu était le tombeau de Maître Hiram. Nous voilà replongés dans la perte et le deuil. Mais cette fois, le chemin de la Vertu semble plus évident, mieux balisé qu’au troisième degré.
Lire aussi notre article complet sur Galaad au 14ème degré
Vertu et perfection
Au quatorzième degré, la Vertu mène à la perfection :
– Qui vous a conduit ici ?
L’Amour de la Vertu.– Que nous apportez-vous ?
Mon zèle à Servir la Franc-Maçonnerie et mon désir de parvenir à la Perfection.
De même, dans le rituel d’instruction :
D – Êtes-vous Grand Élu, Parfait et Sublime Maçon ?
R – J’ai travaillé à me perfectionner.
Ainsi, la perfection ne peut être atteinte que par le zèle, le travail et le désir ardent de pratiquer la Vertu.
La perfection transparaît en outre dans le titre de « Grand Elu, Parfait et Sublime Maçon ». On note le retour de l’élection dans le titre du grade. L’élection relève ici autant d’une décision divine que d’une volonté personnelle de s’élever. Certes, nous avons été choisis (cf. le treizième degré : « Le G.A.D.L.U. vous a choisi pour découvrir le plus précieux trésor des maçons ») mais il nous appartient de continuer à avancer sur le « sentier de la Vertu » qui conduit assurément à la perfection.
Au final, effort, zèle et constance doivent nous guider :
LE TROIS FOIS PUISSANT GRAND MAITRE
Que le zèle le plus fervent et la plus grande constance soient à jamais la règle de vos actions.
Je vous confère le titre de Grand Élu, Parfait et Sublime Maçon.
Conclusion
La Vertu n’est jamais acquise. Elle est un dépassement permanent, une envie constante de se perfectionner. L’exemple de Galaad nous rappelle que la Vertu est « l’accomplissement du devoir porté jusqu’au sacrifice », selon la formule rencontrée au quatrième degré.
La Vertu est une foi sans dogme, un élan sans ambition, un zèle sans fanatisme. Elle relève peut-être de la quadrature du cercle, mais ouvre la porte des plus grands Mystères.
Arrivé au bout du cycle salomonien, on constate avec soulagement que la Vertu ne disparaît pas avec la destruction du Temple. Les Grands Élus se dispersent tout en poursuivant leur oeuvre d’exemplarité et de transmission :
Ils vivaient dans la vertu, s’assistant les uns les autres et ne reconnaissant nul supérieur parmi eux, si ce n’est en vertu.
En réalité, la Vertu n’a pas besoin de temple. Elle est ce potentiel, ce feu, ce trésor que tout franc-maçon porte en lui et qu’il doit s’attacher à réactiver et à cultiver, dès lors que les conditions le permettent.
Pour aller plus loin :
Ce livre numérique pdf (75 pages) comporte 20 planches relatives aux 13ème et 14ème degrés.
Décryptez les notions essentielles, de la Voûte sacrée à la dispersion des Grands Elus, en passant par le voyage de Guibulum, le souvenir d’Enoch, la décadence de Salomon ou le sacrifice de Galaad…
Modif. le 13 octobre 2024