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Le tronc de la veuve : planche maçonnique

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Le tronc de la veuve : voici une planche maçonnique sur le tronc de bienfaisance, le tronc hospitalier ou aumônière.

Jadis, selon une légende, les fonds de l’Hospitalier ou de l’Aumônier, forcément en pièces, étaient conservés en permanence dans un sac ou une bourse.

A la fin de chaque tenue, le sac circulait et chacun plongeait sa main dans le sac et pouvait, en fonction de sa situation, soit mettre de l’argent soit en retirer, toujours anonymement. Le sac était pesé avant la tenue et revenait alourdi ou allégé.

Aujourd’hui, il est demandé à chacun de verser une somme modique (habituellement 2 euros). Le décompte est effectué par le frère Orateur et le montant enregistré par le frère Secrétaire, qui en donne mention dans la planche tracée travaux : « le tronc de la veuve est revenu lesté d’une pierre plate de … kilos et de … grenailles, éclats ou brisures ».

La circulation du tronc de la veuve appelle donc le versement d’une obole, mot qui se définit comme une petite pièce, une très petite somme d’argent ou une modeste contribution. Autrefois, on versait l’obole aux veuves ou aux pauvres.

La circulation du tronc de la veuve rappelle, au moins dans sa forme, la quête qui est réalisée lors des messes chrétiennes. Précisément, la quête fait partie de « l’offertoire » : par le passé, les fidèles venaient offrir au le pain et le vin de l’eucharistie, ainsi que quelques pièces ou produits de la terre pour permettre au prêtre de subsister.

Pourquoi cette dénomination de « tronc de la veuve » ? La franc-maçonnerie est définie comme « une veuve et ses enfants ». Le mot « veuve » a la même étymologie que « vide », dans le sens de « privé de ». Les franc-maçons sont orphelins de la Connaissance, du Verbe, de la Vérité, et orphelins d’Hiram, le maître architecte disparu. Paradoxalement, cette perte renforce la fraternité, et chacun se doit d’aider ses frères matériellement et spirituellement.

A noter que les fonds récoltés à travers le tronc de veuve sont affectés à une caisse distincte de celle du Trésorier ; cet argent sert uniquement à secourir les frères dans la détresse. L’Hospitalier délivre, sur instruction du V.M., les sommes destinées aux membres de la loge dans le besoin.

Le tronc de la veuve prend généralement la forme d’un sac ou d’une boîte munie d’une fente, ornés d’un coeur.

Voici donc une planche maçonnique sur le tronc de la veuve, aussi appelé tronc hospitalier.

Voir aussi notre liste de planches au 1er degré

Avant la chaîne d’union et la fermeture des travaux, paroxysme de l’égrégore qui enfante l’osmose alchimique et spirituelle dans notre cœur, âme et esprit, la voix du V.M. invite le frère Hospitalier à circuler, précédé par le frère Maître des Cérémonies. Le premier porte un sac noir, l’autre un sac blanc, comme un rappel de la dualité fondamentale, illustrée entre autres par le symbole du yin et du yang.

Ce duo Maître des Cérémonies et frère Hospitalier prépare à l’unité ; les deux grenades locataires de B.et J. supervisent cette unité pour laquelle nous travaillons, néanmoins aucune route n’est longue aux coté d’un ami, la dualité peut être bienfaisante, même au sein du pavé mosaïque.

Le frère Hospitalier arpente donc le carré long de notre lieu sacralisé, avec le regard, la gestuelle et l’esprit de proposition et d’invitation à la générosité.

Ce traditionnel, mais encore et toujours voyage de nos deux officiants ne cessera jamais de se renouveler au fil immuable des tenues : c’est le cœur et la raison qui cheminent, ou la raison du cœur pour le tenant de l’aumônière, de l’Orient au Midi et de l’Occident vers le Septentrion et enfin de nouveau vers l’Orient pour rendre compte, telle est la règle. Cette quadrature de la générosité émane de l’action désintéressée et de la charité des initiés que nous sommes.

Le duo, dans sa foi, effectue sa route dextrorsum en quête de propositions et d’oboles dans une halte furtive et personnalisée, mais en réalité longue et unitaire. Ce périple se fait dans le silence, comme si le don était un acte sacré.

Ce devoir de fraternité rappelle l’abandon des métaux sur le parvis. Verser son obole est un acte qui consiste à s’alléger, à se dépouiller, à se détacher, bref à accomplir cette séparation alchimique qui est l’objet même de la démarche maçonnique. Cette séparation alchimique, c’est l’Oeuvre au noir, d’ailleurs, le tronc de la veuve n’est-il pas noir ?

Le noir est la couleur de la mort : par le geste de verser l’obole, nous abandonnons la matière, nous mourrons à la partie de nous qui masquait la lumière. Ce deuil annonce une renaissance spirituelle.

Au final, introduire une pièce dans le tronc de la veuve est un geste symbolique autant qu’un acte concret.

Souvenons-nous du soir de notre initiation. Le frère Expert, en préambule de l’épreuve de la Terre, s’exprime ainsi :

Je vous prie de me remettre ce que vous portez sur vous de précieux en particulier tous objets en métal qui symbolisent ce qui brille d’un éclat trompeur.

Rituel d’initiation au 1er degré

Cette séparation permet de lever le voile sur notre être véritable. Elle est indissociable d’une autre phrase du rituel, prononcée par le V.M. lors de l’épreuve du Feu :

Puisse le Feu qui vous a enveloppé se transmuer dans votre cœur en un Amour ardent pour vos semblables, puisse la Charité inspirer désormais vos paroles et vos actions.

Plus tard, à la fin de la tenue, il dira :

Sachez, mon TCF, que la Bienfaisance est l’une des Vertus dont la pratique est la plus chère aux Francs-Maçons. Il ne faut pas la confondre avec l’aumône, qui abaisse celui qui la reçoit sans élever celui qui la donne.

Un conseil avisé, un acte de solidarité, un service rendu, sont parfois plus efficaces que l’argent. Les métaux, dont on vous a demandé la remise avant d’entrer dans ce Temple, symbolisent tout ce qui brille d’un éclat trompeur. C’est la monnaie courante des préjugés vulgaires : elle constitue une richesse illusoire, que le sage doit savoir mépriser. L’homme qui aspire à être libre doit apprendre à se détacher des choses futiles et se souvenir que la cupidité est le pivot de tous les vices.

Mais ces métaux, convenablement maniés par le sage, peuvent aussi servir à faire le bien.

C’est alors que le V.M. demande à ce que l’on restitue les métaux aux nouveaux initiés : désormais, « ils sauront les utiliser avec discernement », affirme-t-il.

Il conclut :

Mon TCF, à la fin de cette Tenue, lorsque le Frère Hospitalier vous présentera, comme à nous tous, ce que nous appelons le Tronc de la Veuve vous pourrez y verser votre obole comme acte de bienfaisance.

Votre offrande sera le témoignage de l’esprit de sacrifice qui doit animer tous les Francs-Maçons.

Verser son obole dans le tronc de la veuve constitue un acte de sacrifice et de pureté qui nous détache du contingent et du vulgaire, qui nous permet de séparer le subtil de l’épais, qui conduit l’éternel cherchant que nous sommes à se débarrasser de tout ce qui le « plombe », au sens alchimique.

La charité nourrit l’espérance de notre élévation : donner, c’est s’apauvrir sur le plan matériel, mais s’enrichir sur le plan spirituel.

Ah ! Que ne suis-je riche pour venir en aide au pauvre que je suis.
Tristan Bernard

Pour aller plus loin :

Les essentiels du premier degré maçonnique couverture

Ce livre numérique pdf (114 pages) comporte 33 planches essentielles pour approfondir les thèmes et symboles du premier degré maçonnique.

Il offre des points d’appui dans le labyrinthe des objets et concepts à décrypter.

Modif. le 7 novembre 2024

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