Press "Enter" to skip to content

Les trois fenêtres du tableau de loge (planche)

5/5 (1)

Les trois fenêtres du tableau de loge : que symbolisent-elles ? Comment interpréter ces trois ouvertures ? Voici une planche au 1er degré REAA.

Les trois fenêtres qui sont représentées sur le tableau de loge possèdent un symbolisme profond mais qui n’est pas évident au premier abord.

En terme d’architecture, la fenêtre est une baie, munie d’une fermeture vitrée, donnant du jour à l’intérieur d’un bâtiment. Elle permet le passage de la lumière, mais aussi de l’air et du son.

La fenêtre est une ouverture sur deux mondes, l’un extérieur, l’autre intérieur. La vitre dont elle est pourvue est symbole de transparence et de vérité. Si on la considère comme une figure de la dialectique du dedans et du dehors, ainsi apparaît-elle comme une barrière ou une frontière, ou encore comme un lien entre le familier et l’étranger, en raison de sa double appartenance à l’espace public et l’espace privé.

C’est dans la fenêtre que réside toute espérance de lumière, de lever de Soleil, d’horizons, et en tant qu’ouverture, elle fait évoque l’imaginaire. Elle donne accès au monde extérieur et permet à cet extérieur de pénétrer en-dedans.

La fenêtre revêt de multiples aspects symboliques, dont le plus connu est l’ouverture au monde et aux divers savoirs, elle permet aussi l’accès à l’inconnu.

Les trois fenêtres présentes sur le tapis de loge du premier degré maçonnique seraient-elles les « fenêtres de l’âme », qui permettent d’entrer en contact avec l’Esprit ?

Entrons plus avant dans le symbolisme des trois fenêtres du tableau de loge maçonnique, à travers cette planche maçonnique au premier degré REAA.

Voir aussi notre liste de planches au grade d’apprenti

Pourquoi trois fenêtres sur le tableau de loge ? Le nombre 3 est le nombre de l’apprenti et rythme sa vie ; de par son âge, dans ses pas, par la batterie ou encore par le nombre de coups frappés à la porte.

Trois est donc aussi le nombre de fenêtres représentées sur le tableau d’apprenti. Ce tableau est une représentation de l’univers et de la vie humaine. Y sont dessinés tous les symboles et objets symboliques qui accompagnent nos travaux.

La forme des trois fenêtres peut varier selon les tableaux. Quoi qu’il en soit, elles représentent toujours les principales heures du temps maçonnique : celle où les ouvriers se mettent à l’ouvrage, celle où ils l’accomplissent, celle où ils se reposent. Elles peuvent également symboliser les trois grandes étapes de l’initiation maçonnique, à savoir la purification, l’épreuve et la perfection.

Une autre interprétation les place aussi sur les trois plans de l’existence : le plan physique, le plan émotionnel et le plan spirituel. On peut y voir également le symbole des trois grandes vérités de cette existence : la vérité de la matière, la vérité de l’énergie et la vérité de l’esprit.

Quelque soit le sens choisi, les trois fenêtres du tableau de loge rappellent que l’être humain est un être tridimensionnel, composé de corps, d’âme et d’esprit.

Le symbole des trois fenêtres trouve son origine dans l’Ancien Testament, plus précisément dans la description du temple de Salomon.

Dans le Premier Livre des Rois, Salomon fait bâtir un temple en hommage à Dieu ; celui-ci comportait des fenêtres à grilles fixes :

Le roi fit à la maison des fenêtres solidement grillées.

Premier Livre des Rois, 6, 4

Telles qu’elles sont représentées sur le tapis de loge, chacune des trois fenêtres occupe une place particulière : la première est à l’orient, la deuxième au midi et la troisième à l’occident. Aucune fenêtre n’est placée au nord, ou tout au moins aucune n’y est matérialisée.

Parmi les trois fenêtres du tableau de loge, la fenêtre de l’orient apporte la douceur de l’aurore, son renouveau d’activité. Elle représente la vie qui renaît chaque matin après la nuit ; c’est la victoire de la conscience sur l’inconscient (l’imagination, les rêves, la Lune).

Elle éclaire le Vénérable Maître : « De même que le Soleil se lève à l’Orient, le Vénérable Maître s’y tient pour ouvrir la carrière du jour ». Le Vénérable Maître va ainsi donner naissance à une nouvelle journée de travail.

L’ouverture de la loge nous fait passer d’un temps profane à un temps sacré. Nous allons devoir adopter une attitude de réflexion, propre à notre évolution intérieure.

« Quelle heure est-il, Frère Second Surveillant ? Il est midi plein, Vénérable Maître. »

Nous voici à la fenêtre du midi. Elle apporte force et chaleur. Le Soleil est au plus haut de sa course et donne à cette fenêtre sa véritable fonction : éclairer nos travaux.

Nous sommes alors en mesure de faire notre travail d’introspection et de travailler sur la pierre brute en utilisant le maillet, le ciseau et la règle à 24 divisions, ainsi qu’à notre Temple intérieur, avec rigueur et précision.

A ce sujet, il est intéressant de noter que les loges des grands chantiers du Moyen­ Âge étaient généralement adossées au côté sud de l’église. C’est l’endroit où l’ensoleillement est le plus fort et le plus long. Cela permettait aux tailleurs de pierre de profiter pleinement de la lumière du jour pour y prendre leur repas, s’y reposer, mais aussi pour travailler et recevoir les enseignements sur l’art de bâtir.

Voir aussi notre article sur l’orientation des cathédrales

Parmi les trois fenêtres du tableau de loge d’apprenti, la fenêtre placée à l’occident véhicule une lumière au déclin apparent, qui rappelle la mort symbolique et la régénération. C’est aussi le côté de la porte de sortie du temple, vers le monde profane, où les frères tenteront de rayonner. C’est également l’accès à la salle des banquets où les frères feront vivre la fraternité durant les agapes.

« Quelle heure est-il, Frère Premier Surveillant ? Il est minuit plein Vénérable Maître ». Nous pouvons alors regagner le monde profane.

Pour les Egyptiens, la journée ne commençait pas au matin, mais le soir au coucher du Soleil, début de son périple nocturne au cours duquel il passe par le nord, endroit où il n’y a pas de fenêtre sur le tableau de loge.

Les trois fenêtres du tableau de loge en appellent une quatrième, absente.

Le nord ou « septentrion », quatrième des points cardinaux, symbolise la nuit, l’obscurité. Il n’y a donc pas besoin de fenêtre. La lumière de l’occident semble suffire à éclairer la colonne du septentrion, son intensité étant propice à la maturation des apprentis.

Selon une autre interprétation, le nord reçoit la lumière de manière indirecte, par reflet. A ce titre, le nord est semblable à la Lune, astre qui n’émet pas de lumière mais la reçoit du Soleil. Le parallèle se fait aisément avec les apprentis qui, s’ils gardent le silence, n’en demeurent pas moins présents sur la colonne du septentrion et participent aux travaux par leur écoute attentive.

Pour se réaliser, l’éveil du maçon doit se faire dans un endroit sacré, la loge. La loge, lieu de tous les possibles où se crée et se joue en permanence le miracle de la vie et où se manifestent les cycles de lumière, de conscience et d’apprentissage. Or cette loge doit être positionnée convenablement dans l’espace : les trois fenêtres telles que représenté sur le tableau de loge maçonnique ordonnent l’orientation du Temple, comme une boussole spirituelle, en figurant les quatre points cardinaux.

Or, s’il y a quatre points cardinaux, seulement trois fenêtres sont représentées. La quatrième, celle du nord est invisible : aurait-elle la même vocation que la rosace présente au nord dans les cathédrales gothiques et qui dispense la lumière noire, la lumière de l’incréé, de l’indéfini qui ne peut être représenté ?

Au final, les trois fenêtres du tableau de loge maçonnique d’apprenti nous invitent à comparer notre chemin d’initié avec la course apparente du Soleil. Leur correspondance avec les placements dans la loge des sièges et plateaux des Vénérable Maître, premier et second surveillants, semble leur conférer le caractère des piliers Sagesse, Force et Beauté.

Nous avons-là la conciliation de la solidité de l’édifice avec la nécessité d’y placer des ouvertures pour laisser passer la lumière, sans altérer la structure du bâtiment. Ceci doit cependant rester symbolique car il est dit que le Temple est le lieu sacré et couvert où la lumière naît d’elle-même par la communion avec les symboles. La lumière vient du ciel qui est la voûte étoilée et est transmise par le tableau qui est le cœur de la loge.

Les trois fenêtres du tableau de loge maçonnique sont des ouvertures sur le principe créateur, un lieu de passage, de communion avec le sacré. Elles sont présentes sur le tableau de loge qui contient tous les outils symboliques nécessaires à la création et l’épanouissement de la vie spirituelle.

Dans le Temple, le franc-maçon peut éventuellement se passer de lumière naturelle mais pas de lumière spirituelle. Dans son éveil spirituel, il passe par trois états de lumière :

  • initié, il se met en capacité de la percevoir, par le silence notamment, mais il se met aussi en état de transformation par l’activation de tous ses sens, et de communion avec les quatre éléments et les outils symboliques. Il travaille sur lui-même comme l’opératif dégrossit la pierre brute ; il doit se libérer de ses certitudes,
  • ensuite, vient le moment où il capte la lumière de manière consciente, ce qui le guide vers l’éveil spirituel, jusqu’au moment où lui-même rayonne. Il est alors poli et prend la forme de la pierre cubique prête à s’intégrer à l’édifice bâti par l’effort collectif de lui-même et de ses frères,
  • enfin, devenu un être conscient, il doit rester vigilant pour ne pas régresser.

Peut-être ces trois fenêtres reflètent-elles ces trois états de lumière et, à travers les grilles dont elles sont dotées, la filtrent afin que le maçon ne se perde pas. Ces grilles façonnent la lumière, lui donnent un sens particulier, à l’image des vitraux dans les églises.

Pour aller plus loin :

Les essentiels du premier degré maçonnique couverture

Ce livre numérique pdf (114 pages) comporte 33 planches essentielles pour approfondir les thèmes et symboles du premier degré maçonnique.

Il offre des points d’appui dans le labyrinthe des objets et concepts à décrypter.

Modif. le 9 septembre 2024

Vous pouvez noter cet article !