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Que la Beauté l’orne : planche maçonnique

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Que la Beauté l’orne : que symbolise cette vertu ? En quoi la Beauté complète-t-elle la Sagesse et la Force lors des travaux maçonniques ? Voici une planche au 1er degré.

Lors de l’ouverture des travaux, après avoir demandé la Lumière, le Premier Surveillant se la voit accordée par le Vénérable Maître : « Que cette Lumière nous éclaire ! »

Cet ordre provoque l’allumage des trois piliers par le Maître des Cérémonies.

Lors de l’allumage du premier pilier, le Vénérable Maître déclare : « Que la Sagesse préside à la construction de notre édifice ! ». Lors de l’allumage du second pilier, le Premier Surveillant s’exclame : « Que la Force le soutienne ! ». Enfin, lors de l’allumage du troisième pilier le Second Surveillant énonce la troisième vertu :

LE SECOND SURVEILLANT, frappant un coup de maillet
Que la Beauté l’orne !

Rituel d’ouverture des travaux au 1er degré

Les trois piliers sont ainsi éclairés :

  • le pilier Sagesse, associé au Vénérable Maître, est de style ionique,
  • le pilier Force, associé au Premier Surveillant, est de style dorique,
  • le pilier Beauté, associé au Second Surveillant, est de style corinthien.
beauté dorique ionique corinthien

La Beauté est donc la vertu qui vient parachever l’édifice, le couronner. Elle peut aussi symboliser l’idéal qui sous-tend l’oeuvre, idéal qui a vocation à prendre forme concrète. La Beauté mêle donc à la fois énergie créatrice et pouvoir de réalisation, sagesse et force, Boaz et Jakin.

Mais comment définir précisément cette beauté ? Comment peut-elle se traduire dans la vie du franc-maçon ?

Voici une interprétation de la phrase : « Que la beauté l’orne ».

« Que la Beauté l’orne » est le troisième voeu prononcé lors de l’ouverture des travaux, après la Sagesse (l’intention pure) et la Force (la capacité de mise en oeuvre).

La Beauté peut être définie comme un ornement qui évoque la finalisation de la construction, l’oeuvre accomplie, la perfection atteinte. Ce serait donc l’aboutissement du chemin spirituel : l’édifice achevé marque l’extension maximale du domaine du sacré, l’union de l’Homme avec le Grand Architecte de l’Univers, en même temps que l’avènement d’une société fraternelle.

Pourtant, nous savons que nous n’aurons jamais fini de bâtir le temple : notre travail n’aboutira jamais. Mais la beauté peut aussi s’appliquer au travail lui-même et aux valeurs associées : force d’âme, courage, constance, persévérance. La beauté prend alors un caractère dynamique : elle est perfection en puissance, intention en voie de réalisation, elle est tout simplement progrès.

Les compagnons sur le chantier offrent cette image de la beauté : des hommes qui œuvrent ensemble, se soutiennent, se relèvent mutuellement, partagent leur pain et leurs connaissances, tous tendus vers un même objectif.

De même, la beauté trouve son expression dans la loge en tant que représentation d’une société parfaite, ordonnée, où règnent la tolérance, le respect, le travail, le partage et l’amour fraternel.

La beauté atteint son paroxysme au moment de la chaine d’union : les francs-maçons s’unissent dans une égalité parfaite vers un idéal commun.

En réalité, la chaine d’union est à la fois le symbole d’un idéal inatteignable et la concrétisation de cet idéal, puisque la chaine est réellement vécue. Quoi qu’il en soit, elle est l’expression de la plus grande beauté, une beauté qui débouche sur la Joie, valeur que l’on retrouve au moment de l’extinction du pilier Beauté, à la fin des travaux.

La beauté n’est jamais, ce me semble, qu’une promesse de bonheur.
Stendhal

Au sens philosophique, la beauté est synonyme d’équilibre et d’harmonie.

Pour Aristote, le beau est ce qui réunit la grandeur et l’ordre.

Pour Platon, la beauté est la « splendeur du vrai ».

Pour Kant, le beau est le symbole du bien moral.

Pour Vasarely, inventeur de l’Op Art, l’essence du beau est l’unité. L’unité se fonde sur la dualité des choses, qui produit les contrastes. Cette unité qui rassemble les opposés complémentaires est à la fois physique et métaphysique : elle permet de comprendre la structure matérielle du monde tout autant que sa structure spirituelle. Pour nous, cette beauté s’exprime à travers le ternaire, omniprésent en loge.

Pour l’écrivain François Cheng, « la beauté n’est pas un simple ornement, elle est le signe par lequel la création nous signifie que la vie a du sens ». Voir la beauté universelle, c’est donc reconnaître que l’univers n’est pas un ensemble neutre et indifférencié : il y a un message à découvrir, un chemin à accomplir, une vie à vivre, une conscience à ouvrir.

Et de fait, notre perception de la beauté grandit lorsqu’on se rend compte que tout est conforme à l’ordre éternel, ce qui nécessite d’avoir atteint un certain niveau de compréhension, de sagesse et de sérénité. Celui qui demeure dans la paix intérieure verra la beauté en toute chose : c’est l’émerveillement.

La beauté cultivée en loge a vocation à ressurgir au quotidien sous différentes formes :

  • la beauté est d’abord un état d’esprit, ouvert, positif, empreint d’espérance,
  • c’est aussi un mode de pensée fondé sur l’analyse, le désir de comprendre et de déceler les causes, ce qui amène à sortir du jugement binaire et à voir la beauté cachée des choses et des individus,
  • c’est ensuite un certain rapport à l’autre fondé sur la bienveillance, l’attention, la coopération, la générosité, le dévouement, l’assistance voire le sacrifice. En ce sens, la beauté est aussi exemplarité,
  • c’est enfin un rapport à soi-même basé sur l’exigence, la lutte contre ses mauvais penchants et le dépassement de soi, dans une perspective quasi chevaleresque.

Pour nous francs-maçons, la beauté ne s’applique pas uniquement à l’édifice achevé. La beauté se retrouve dans l’intention, dans les plans, dans le travail à fournir et dans la manière de le mener.

La beauté au sens maçonnique peut être abordée comme une notion philosophique, mais elle doit avant tout rester un symbole libre d’interprétation. Il n’y a pas de définition arrêtée de la beauté : la beauté est à rechercher partout, à cultiver sans cesse, dans toutes les circonstances.

Au final, la beauté est un idéal en voie de réalisation, un chemin qui ne s’arrête jamais. Le chemin lui-même est beau, peut-être parce qu’il est sacré. En effet, la beauté se révèle et grandit par l’ouverture de la conscience et l’extension du domaine du sacré.

Pour aller plus loin :

Les essentiels du premier degré maçonnique couverture

Ce livre numérique pdf (114 pages) comporte 33 planches essentielles pour approfondir les thèmes et symboles du premier degré maçonnique.

Il offre des points d’appui dans le labyrinthe des objets et concepts à décrypter.

Modif. le 9 avril 2025

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