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L’Orient : symbolisme maçonnique

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L’Orient : planche maçonnique. Qu’évoque l’Orient ? Que symbolise-t-il ? Que promet-il ? Comment l’interpréter ?

– F. Second Surveillant, où est placé le V. M. en loge ?
– A l’Orient V. M.
– Pourquoi est-il placé ainsi ?
– Comme le soleil se lève à l’Orient pour ouvrir la carrière du jour, de même, le V. M. siège à l’Orient pour ouvrir la loge et diriger les travaux.

L’Orient est un symbole maçonnique majeur. Mais, problème, l’orient géographique n’existe pas. Tel l’horizon fuyant, l’orient s’éloigne à chaque pas que nous faisons vers lui. Pour le pays du Soleil levant, l’orient c’est Hawaï, la Californie. Pour la Californie, le proche orient est la côte Est, nous sommes son extrême orient. Ouroboros se mord la queue…

L’Orient et l’Occident sont nés de l’Histoire, en l’occurrence de notre histoire gréco-romaine et de la volonté des conquérants de se diriger vers l’orient où la terre se prolongeait, alors qu’à l’occident elle s’arrêtait aux colonnes d’Hercule.

C’est d’une succession mal réglée entre les fils de l’empereur Théodose que sont nés les concepts d’Orient et d’Occident. En divisant l’Empire romain, ils divisèrent également la chrétienté en deux univers séparés, qui au nom du même dieu s’excommunièrent réciproquement.

De même, les arabes musulmans vont distinguer deux parties à leur empire : le Maghreb (« Couchant ») et le Machrek (« Levant »).

Au XIIIe siècle, la Route de la soie repoussa les limites de l’orient jusqu’à l’extrême, réduisant l’orient précédent au rang de « proche » pour les Français et de « moyen » pour les Anglais.

Il fallut attendre la fin du XVe siècle pour que Christophe Colomb nous offre un orient au-delà de l’occident…

Dans tous les cas, l’orient évoque le voyage, l’inconnu et la quête. Il évoque aussi l’exotisme, au sens de ce qui est « au-delà » (du grec exô : « au-dehors »).

Entrons plus précisément dans le symbolisme de l’Orient en franc-maçonnerie.

Voir aussi notre liste de planches au premier degré

Puisqu’il n’existe pas matériellement, l’Orient n’est qu’un symbole, un symbole universel. Dans de nombreuses traditions, l’Orient est la direction d’où vient la Lumière, la Connaissance et par là même, la Vérité. C’est aussi le côté duquel s’ouvre le Temple de Salomon. C’est le lieu de création de l’initié dans la lumière naissante.

« Debout, face à l’Orient ! » signifie que nous nous tenons prêts à recevoir cette lumière naissante. Dès lors que le V. M. ouvre la loge, comme le grand luminaire ouvre la carrière du jour, le franc-maçon est replacé dans la création.

Chaque renouvellement transporte sa vertu purificatrice, induisant un nouveau départ du cherchant. En cela, comme le Soleil levant constitue le fondement d’un espace-temps, l’ouverture de la loge constitue un espace-temps sacralisé.

« Nous ne sommes plus dans le monde profane … et que nos regards se tournent vers la Lumière. »

L’Orient est lieu de Lumière. Pour Avicenne, il est la patrie de l’âme et de toute civilisation. C’est dans ce pays de l’âme universelle que les soufis situent les sciences spirituelles.

C’est le domaine de l’abstraction, c’est encore le monde des idées vraies, « idéales ».

Faut-il opposer l’Orient et l’Occident ? En réalité, les rapports entre Orient et Occident sont d’ordre spéculaire, autrement dit ces deux termes se réfléchissent comme dans un miroir. De la même manière que lumière et ténèbres sont indissociables, Orient et Occident sont complémentaires dans le Tout.

Pour les soufis, les voyages commencent par « l’exil occidental » qui est un retour à la materia prima, à la purification, au dépouillement alchimique ; étape nécessaire avant la réintégration dans la source orientale de la Connaissance.

L’Occident est le domaine de la matière, de la réalité, du sensible. Quant à l’Orient, il est associé à l’Oeuvre au blanc qui succède à l’Oeuvre au noir lors du processus alchimique.

Le Dragon blanc, représentation hermétique de l’Orient, naît de la matière noire du Corbeau, lequel figure l’Occident. Comme le Corps se sépare de l’Âme, l’opposition entre Orient et Occident est déterminée par deux hémisphères, l’un blanc, l’autre noir, ce qui rappelle le symbolisme du yin et du yang.

Pour les alchimistes, l’ordre sera rétabli lorsque la synthèse des oppositions sera accomplie. N’est-ce pas la méthode maçonnique qui enseigne la nature nécessaire et féconde des oppositions, les représentant comme des facteurs fondamentaux de l’évolution du monde, accordant à l’interpénétration des contraires un caractère causal de l’harmonie universelle ?

Pour l’écrivain Maurice Maeterlinck, l’union de l’hémisphère oriental et de l’hémisphère occidental du cerveau est indispensable pour espérer progresser vers un objet en réalité introuvable : le « Soi », synonyme de plénitude de l’être.

Pour sa part, Rabindranath Tagore (philosophe indien) espère que l’union de l’Orient et de l’Occident permettra d’accomplir l’unité des connaissances spirituelles et scientifiques.

Quant à la philosophe Marie-Madeleine Davy, elle affirme que le véritable œcuménisme ne peut naître que de la rencontre entre l’Orient et l’Occident, source d’espérance universelle. « Ce n’est que lorsque Tout est Un que l’on atteint l’unité transcendante des religions. La religion universelle est celle de l’intériorité ».

Tout trois nous conduisent à nous intéresser à l’Orient intérieur, celui qui nous est propre.

L’Orient est un chemin, un pèlerinage qui nous conduit à avancer vers notre lumière intérieure.

Tout le monde a besoin de savoir où est l’Orient pour « s’orienter », c’est-à-dire progresser dans la bonne direction.

Dans la vie spirituelle, l’Orient constitue un pôle magnétique, un pôle qui nous attire vers la Source, vers le Tao.

Dans le monde profane, l’oubli ou la perte des valeurs augmente le nombre des « désorientés », qui ne savent pas où est l’Orient véritable, monde de l’âme attirée vers le Soi et les vérités métaphysiques.

Chercher son Orient intérieur, c’est chercher les fondements de notre Etre, c’est atteindre un autre niveau de conscience. Pour cela, il faut avoir mis à distance son ego. C’est à cette condition que nous pourrons nous lever, nous tenir debout.

Le lever de l’astre solaire, tout-puissant de Vérité, évoque aussi la pousse d’une plante, d’un arbre, ou le fait de germer et de croître. Précisément, la formule « Debout, face à l’Orient » évoque le fait de se lever. Se lever, c’est aussi donner sa lumière, si pâle soit-elle, et la partager avec l’autre.

Ne somnolons pas dans les ténèbres du matérialisme, seulement éclairé par les éclats trompeurs des métaux. Ecoutons le chant du coq et cherchons l’aurore, ce moment mystérieux où l’approche de l’éclat du jour commence à chasser les ténèbres.

Lorsque l’homme plonge à l’intérieur de lui-même, dans son Orient intérieur, ses propres ténèbres sont absorbées par la lumière. Il n’y a plus de ténèbres, seulement de la lumière.
Marie-Madeleine Davy, Le désert intérieur

Au début de ce voyage en express Orient, nous faisions allusion à l’inaccessible Orient, et à un Orient au-delà de l’Occident.

Cet Orient qu’il est inutile de chercher, que nous trouverons tous, vers lequel nous marchons inéluctablement depuis notre premier cri, c’est l’Orient éternel. C’est l’initiation suprême.

Paradoxalement, pour les orientaux, l’occident est le pays de l’arrivée, celui du repos, donc le pays des morts, la Terre pure occidentale de la béatitude, le paradis, la Jérusalem céleste des chrétiens. C’est le pays du Soleil couchant, le ponant, celui des pommes d’or du jardin des Hespérides au pied du mont Atlas. C’est l’Orient au-delà de l’Occident, le royaume de l’au-delà, celui qui se situe au-delà de la mort.

Pour aller plus loin :

livres maçonniques

Modif. le 28 octobre 2024

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