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Le jubilé maçonnique au REAA : planche

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Le jubilé maçonnique au REAA : en quoi consiste-t-il ? quelle est sa signification ? Voici une planche au 1er degré.

Un jubilé n’est autre qu’une célébration par la fête.

Ce n’est pas une commémoration, mais bien une fête maçonnique écossaise, écossaise à l’instar des 33 degrés de notre rite. C’est plus précisément la ponctuation d’une activité maçonnique ininterrompue pendant 33 années.

Par ce nombre trente-trois s’instille une analogie entre le degré et la durée, entre l’âge et le grade.

Mais une année n’est qu’un repère profane alors qu’un degré est un barreau de l’échelle initiatique.

33, dans nos référents communs, c’est bien sûr l’âge de la mort de Jésus de sa résurrection donc, après seulement trois ans de prédication pour trente années de maturation.

33, c’est aussi le nombre de vertèbres d’un humain.

Nous allons le voir, le jubilé écossais est avant tout une survivance de traditions hébraïques et chrétiennes, dont le fondement pose encore question aujourd’hui.

En premier lieu, le jubilé signe un accompagnement de l’histoire par la tradition. En second lieu, il est une marque vivante de la tradition dans le processus initiatique.

Voici une planche sur le jubilé maçonnique au REAA.

A l’origine, un jubilé est une solennité publique célébrée tous les 50 ans chez les Hébreux.

Cette solennité de la Loi mosaïque dans l’antiquité juive a constitué l’une des premières marques, l’un des premiers repères, d’une forme de degré dans l’échelle du temps infini auquel se confronte le temps fini de la vie humaine.

Avec l’instauration du jubilé, se développe en effet, la conscience du temps nouveau, différent de l’observation du temps cyclique de la nature.

Pourquoi 50 ans ? Ce chiffre est à mettre en relation avec 49, multiple de 7, chiffre de la sagesse et de la connaissance.

8 – Vous compterez sept semaines d’années, c’est-à-dire sept fois sept ans, soit quarante-neuf ans.
9 – Le septième mois, le dix du mois, en la fête du Grand Pardon, vous sonnerez du cor pour l’ovation ; ce jour-là, dans tout votre pays, vous sonnerez du cor.
10 – Vous ferez de la cinquantième année une année sainte, et vous proclamerez la libération pour tous les habitants du pays. Ce sera pour vous le jubilé : chacun de vous réintégrera sa propriété, chacun de vous retournera dans son clan.
11 – Cette cinquantième année sera pour vous une année jubilaire : vous ne ferez pas les semailles, vous ne moissonnerez pas le grain qui aura poussé tout seul, vous ne vendangerez pas la vigne non taillée.
12 – Le jubilé sera pour vous chose sainte, vous mangerez ce qui pousse dans les champs.

Livre du Lévitique, chapitre 25

Le jubilé juif n’est pas que la célébration cinquantenaire d’un sacerdoce, c’est surtout le moment des remises de peines et des dettes, coïncidant peu ou prou avec la fin de la vie d’homme.

Une sorte de libération ou de Tabula rasa. Or, faire table rase à échéance donnée, voilà une action qui interroge en franc-maçonnerie où la transmission est reine, bien que l’initiation soit fondée sur un éternel recommencement.

L’ambivalence est donc au coeur de l’agrégation du Jubilé par les rites maçonniques : le commémorer, est-ce laisser une trace du jubilaire par la fête, ou est-ce célébrer l’éternel recommençant qu’est le cherchant ?

L’histoire du jubilé va voir l’agrégation de pratiques chrétiennes, elles-mêmes nourries aux substrats judéo-païens.

Les papes de la chrétienté comprirent assez vite que si la remise des peines était possible, autant en raccourcir les délais pour en multiplier les occasions et augmenter les sources de profit : les jubilés ne sont alors pas si éloignés du trafic des indulgences et autres sources d’enrichissement, dont la contestation amènera le vent de la Réforme.

Quand en l’an 1300, le pape Boniface institua les jubilés chrétiens, il œuvra en homme d’affaires : ayant constaté à quel point les pèlerinages à Rome procuraient déjà aux pénitents des grâces particulières pour le Jugement dernier, et à Rome des subsides conséquentes, il établit des
jubilés, non de 50 mais de 25 ans, pour créer toujours plus de rassemblement considérables de pèlerins… et de fructueuses offrandes.

A côté du temple rôdent toujours les marchands …

On le voit, célébrer un jubilé c’est s’inspirer de la célébration du temps écoulé dans un office ou une fonction, comme s’inspirer d’un principe d’indulgence, de délivrance, de rémission.

Pour un franc-maçon écossais, le jubilé s’inscrit dans la tradition de constance et de fidélité.

L’anniversaire que l’on fête en ayant expurgé le versant exotérique hébraïque avec la remise des peines et des dettes, puis le versant exotérique catholique avec le négoce des indulgences, est devenu pour nous une célébration, celle de l’activité maçonnique continue dans notre rite depuis l’initiation.

Cette célébration est bien rituélique car elle est codée et parfaitement inscrite en tant que telle dans notre corpus symbolique de rituels.

Le jubilé écossais, récupération syncrétique des pratiques judéo-chrétiennes, reste une survivance de croyances, de réflexions et de rites païens qui scandent le temps fini de l’homme dans le temps infini du cosmos.

Cette obsession de mesure de la vie et du temps parait consubstantielle à la nature humaine et le jubilé est un avatar de ces deux colonnes de l’évolution humaine que sont le calendrier et l’alphabet.

Si le temps n’existe pas, puisque c’est nous qui passons et non lui, le jubilé est comme toutes les fêtes, un repère pour nous situer dans notre temps de passage, dans le temps de l’homme plutôt que celui de Dieu, et pour nous dans le temps de l’initié.

Et qu’est-ce qu’un anniversaire si ce n’est une scarification virtuelle et sociale qui désigne à autrui le lieu de notre temps, notre durée ?

Le jubilé cinquantenaire hébraïque embrassait déjà, dans un même élan, les fêtes païennes des moissons avec la fête juive des semaines ou le Chavouot du don de la loi, avant que de se trouver un avatar dans l’effusion de l’Esprit de la Pentecôte (50 en grec).

50 ans ou 50 jours, la symbolique est permanente et signe l’invariant ésotérique. Et voilà que le REAA invente le Trente-trois !

Pour d’aucuns, en glissant du 50 hébraïque au 33 christique, le REAA ne ferait pas qu’embrasser l’ancien et le nouveau.

Il accompagne un autre glissement, un mouvement de passage, des anciens âges de la vie mythique (par la guématrie) aux âges de la vie cyclique (par le solaire) jusqu’aux âges de la vie de l’homme (par ses gènes).

Ainsi l’âge de la mort de Mathusalem (969 ans) est fixé, à rebours, par une combinaison guématrique, l’âge de la mort d’Enoch (365 ans) en référence au cycle solaire et l’âge de la mort du Christ (33) est devenu celui d’une mort et renaissance d’un homme.

C’est pourquoi le jubilé écossais, par son 33, relie le temps de l’homme au temps des dieux, l’humanité mythique à l’humanité historique, l’esprit à la science, le sacré au profane et la mort à la renaissance.

En cela, il est totalement initiatique.

Au REEA, ce jubilé, ce moment de passage, c’est le rappel de l’engagement et de la constance dans l’œuvre maçonnique. C’est une ode à la vie initiatique.

Contrairement à ses deux sources originelles, le jubilé maçonnique écossais ne proclame pas une année sainte, mais un besoin personnel de joie et un besoin collectif de fête.

Alors que fête-t-ton dans cette joie ? Le respect, l’ancienneté, la constance, l’assiduité et cela seulement ? Non, car sinon on pourrait fêter le jubilé maçonnique à tout moment. C’est le serviteur du rite et l’ouvrier de la fraternité que l’on fête.

Les sens de la célébration, c’est ce qui nous anime, en gros depuis que nous donnons des sépultures à nos défunts. Mais par ce jubilé, c’est la Vie que nous fêtons. En honorant nos frères jubilaires, nous fêtons grâce à eux, le sens de la vie, le sens de notre vie d’initié, la conscience et l’amour de la vie.

Savourons cette célébration, c’est un témoignage rare, elle est un lien qui nous unit. Nous le savons bien :

Tout varie. Tout évolue. Tout se transforme. Tout est incertitude. Tout, et face à ce grand tout du chaos, la permanence initiatique cimente le socle de perfectionnement de l’homme et d’espérance du maçon.

Il n’y a jamais de dernier mot. Le temps persiste, l’espace continue et la nécessité de s’adapter à chaque circonstance nouvelle, c’est la vie.

C’est en ce sens que nos frères jubilaires sont les glorieux témoins de cette évidence, comme les pierres vibrantes de notre espérance.

Nous ne voyons ici dans notre lumière que des êtres restés éveillés, les yeux grands ouverts sur la lumière du monde, vivant éternellement leur initiation comme au premier jour, enrichi des autres jours.

L’étymologie de « jubilé » nous renvoie quelque part à la musique :

  • soit par JOBEL, ce bélier avec la corne duquel on faisait un cor pour annoncer l’année sainte, en mémoire du bélier du sacrifice d’Abraham,
  • soit par JUBAL, qui aurait été le premier inventeur des instruments de musique.

La racine n’est pas la même que « jubilatoire », mais la tentation est grande et s’il faut entendre par le coeur, notre oreille est peut-être plus perspicace que notre esprit. Alors, jubilons ensemble …

En matière de jubilé, ainsi nous parle l’histoire des hommes et des maçons écossais.

Pour aller plus loin :

livres maçonniques

Modif. le 5 août 2024

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