Appuyez sur “Entrée” pour passer au contenu

L’humilité : planche maçonnique

5/5 (2)

L’humilité en franc-maçonnerie : en quoi consiste-t-elle ? comment la pratiquer ? Voici une planche maçonnique au 1er degré.

Le mot humilité vient du mot latin humilitas, lui-même dérivé de humus, signifiant « terre ». Cela nous incite à rattacher l’humilité à la terre, où l’homme prend racine comme une graine.

Introduisons l’humilité avec ce verset de l’Ancien Testament :

L’homme n’a rien de plus que la bête : tout est vanité. Tout va vers un même lieu : tout est tiré de la poussière, et tout retourne à la poussière.

L’Ecclésiaste, 3, 19-20

Ce passage décrit le cycle de la vie et le fait que nous sommes matière organique issue de la terre.

Ce rattachement de l’homme à la terre suggère aussi la pudeur, qui est l’absence de vanité, puisque nous venons d’en-bas. La pudeur se révèle par un comportement de retenue, de sobriété et de modération.

Pudeur et modération sont donc indissociables de l’humilité. Ces deux notions accompagnent aussi les vertus de tolérance, d’empathie, de réserve ou de respect.

Dans cette planche, nous ne donnerons pas au terme « humilité » un sens péjoratif tel que soumission, effacement ou renoncement ; nous nous attacherons au contraire à montrer que l’humilité est positive et introduit l’harmonie au sein de notre vie, en particulier dans notre esprit. L’humilité devrait guider notre action.

Voir aussi cette liste de planches au 1er degré

L’initiation commence par l’épreuve de la terre, au sein du cabinet de réflexion. C’est le moment testamentaire, qui marque symboliquement la mort à la vie profane et la renaissance à partir des ténèbres de la Terre, d’où va se créer ce moment de germination.

La notion d’humilité est au coeur de l’épreuve de la Terre, qui commence par le dépouillement des métaux. Il s’agit d’opérer une séparation, de chasser le paraître pour faire place à l’être.

L’humilité devient peu à peu indissociable de la connaissance de soi : se connaître, c’est visiter la matière dont nous sommes faits, un retournement qui mène à une certaine lucidité sur notre condition.

L’humilité ne nous demande rien d’autre, que de nous connaître en vérité : ni plus, ni moins.

Saint Augustin

C’est le « connais-toi toi-même » de Socrate, qui doit nous amener à prendre conscience de notre véritable nature : nous sommes des phénomènes éphémères et limités, semblables à des vagues à la surface de l’océan.

D’autre part, le postulant est placé dans une tenue humiliante (ni nu ni vêtu) ; il est amené à se baisser pour franchir la porte basse ; il doit accepter le bandeau, boire un breuvage amer, plier le genou, respecter la loi du silence ou encore revêtir le tablier blanc d’apprenti.

Autant d’incitations à l’humilité, qui conduisent le néophyte à prendre conscience que cette vertu est précisément la gardienne de toutes les vertus. Sur elle reposent la patience, la bonté, la générosité, le dévouement, la tolérance ou encore la sincérité.

Voilà donc l’attitude qu’il va falloir adopter.

L’initiation est aussi le moment où nous sommes placés face à notre ignorance, ce qui nous incite à la modestie et nous amène à nous remettre en question. On nous incite en outre à un travail sincère et assidu, qui nous conduira à nous dévoiler aux autres et à « avouer » nos défauts et nos faiblesses.

Autrement dit, la franc-maçonnerie nous invite à briser notre armure sociale, à sortir de cette protection artificielle, à nous exposer à cœur ouvert pour en extraire notre dimension véritablement humaine.

L’humilité au sens maçonnique nous oblige à travailler ensemble pour atteindre un idéal commun, ce qui nécessite d’écouter les idées des autres dans un esprit de respect mutuel.

L’humilité nous permet d’aller chercher chez l’autre ce qui nous était auparavant inaccessible : en apprenant des autres, nous apprenons sur nous-même, car nous sommes le miroir de l’autre.

Tu es parce que je suis, je suis parce que tu es.

Nos mythes, nos légendes, nos symboles n’ont pas de vie par eux-mêmes ; ils attendent simplement que nous les incarnions, ensemble. L’humilité est donc promesse de progrès collectif.

L’humilité est indissociable de la fraternité puisque chaque individu est important, puisque chaque être a toujours quelque chose à offrir. Coopération, partage et compagnonnage fondent la démarche maçonnique.

A l’évidence, l’humilité constitue en elle-même la voie de la sagesse et de la bonté ; elle nous aide à nous élever et à nous épanouir, en cultivant en nous la simplicité et l’amour.

Mais l’humilité a aussi besoin d’être incarnée dans la vie profane…

Plus qu’une façon d’agir, l’humilité est un état d’esprit. L’humilité doit être intériorisée de manière à ce que son expression soit naturelle et constante.

Etre humble, c’est avoir une attitude rassurante et authentique, qui nous inscrit dans un équilibre entre notre individualité et notre relation aux autres et au monde extérieur.

L’homme humble inspire confiance car son humilité transparaît sans qu’il la revendique. Une fois cette qualité personnelle acquise, elle doit se manifester au quotidien à travers une attitude confiante mais prudente, positive mais lucide, rassurante mais réaliste. Un équilibre parfois difficile à trouver.

Attention, l’homme humble ne cultive ni le mépris de soi, ni les remords. Son humilité va même jusqu’à reconnaître son manque d’humilité.

Un homme, ça s’empêche.

Albert Camus

Ici, le mot « s’empêcher » signifie s’abstenir de juger, de répondre, d’agir, de se faire une opinion ou une appréciation trop rapidement. S’empêcher, c’est en réalité faire l’effort de s’ouvrir à autrui en retenant ses pulsions, ses passions et ses préjugés.

C’est encore cultiver le doute, analyser, rechercher les causes, bref tenter de cerner la vérité avant d’oser la proclamer.

Descartes, dans son célèbre Discours de la méthode, incite sur l’importance de la modestie intellectuelle, qui consiste à s’avouer à soi-même sa propre ignorance.

Car pour trouver la vérité, il faut d’abord admettre que nous ne savons pas, ce qui nous ouvre la voie à la compréhension. Cette humilité intellectuelle est essentielle pour éviter les erreurs de raisonnement et espérer accéder à certaines réponses.

Il s’agit aussi de s’ouvrir au raisonnement de l’autre, tenter de comprendre son chemin de pensée et oser adopter, l’espace d’un instant, son point de vue. L’humilité va jusqu’à rechercher les idées différentes !

L’humilité nous oblige à plonger à l’intérieur de nous-même pour mieux nous connaître. Elle n’a pas pour but de nous effacer ou de nous enfermer, mais au contraire de mieux nous écouter, de mieux comprendre nos ressorts et nos erreurs.

L’humilité ne grandit pas lorsqu’elle est en cage, et pas non plus lorsqu’elle est revendiquée. Elle s’accompagne avant tout d’exemplarité. C’est en pratiquant l’humilité que nous pourrons diffuser bonheur et amour autour de nous…

Pour conclure, voici les paroles de la chanson Je sais, interprétée par Jean Gabin :

Quand j’étais gosse, haut comme trois pommes
J’parlais bien fort pour être un homme
J’disais, je sais, je sais, je sais, je sais

C’était l’début, c’était l’printemps
Mais quand j’ai eu mes 18 ans
J’ai dit, je sais, ça y est, cette fois je sais

(…) Toute ma jeunesse, j’ai voulu dire je sais
Seulement, plus je cherchais
Et puis moins j’savais

Y a 60 coups qui ont sonné à l’horloge
J’suis encore à ma fenêtre, je regarde, et j’m’interroge
Maintenant je sais, je sais qu’on ne sait jamais

Pour aller plus loin :

Les essentiels du premier degré maçonnique couverture

Ce livre numérique pdf (114 pages) comporte 33 planches essentielles pour approfondir les thèmes et symboles du premier degré maçonnique.

Il offre des points d’appui dans le labyrinthe des objets et concepts à décrypter.

Modif. le 6 juillet 2024

Vous pouvez noter cet article !