La géométrie sacrée : définition. Qu’appelle-t-on « géométrie sacrée » ? Quel rapport avec l’art, l’architecture et la spiritualité ?
La géométrie sacrée aborde les figures et les proportions géométriques dans leur dimension spirituelle. Elle accorde une valeur particulière à ces formes, lesquelles sont alors utilisées dans l’art sacré, les constructions religieuses et comme support des pratiques spirituelles.
L’approche symbolique de ces figures permet d’éclairer les lois universelles : c’est l’idée que certaines formes ou proportions reflètent l’organisation cosmique, le plan divin. Leur juste interprétation donnerait donc accès à la Connaissance et à la Vérité.
La géométrie sacrée peut aussi être abordée comme une quête. Elle est alors la recherche de tout ce qui peut refléter à la fois le Beau, le Vrai et le Juste, c’est-à-dire l’alliance des valeurs esthétiques, philosophiques et spirituelles.
Cette quête peut se faire :
- par l’observation : en effet, les lois géométriques se retrouvent dans la matière, la vie, le corps humain ou le mouvement des astres. La trace de Dieu est partout présente, encore faut-il arriver à la percevoir,
- par l’interprétation : il s’agit de lire et de percer le sens des formes géométriques courantes,
- par la création : il s’agit d’élaborer des oeuvres, des plans ou des constructions qui s’approchent ou reflètent les lois de la géométrie sacrée.
Tentons d’approfondir la définition de la géométrie sacrée.
La géométrie sacrée : définition
Dieu, toujours, fait de la géométrie.
Platon
La géométrie sacrée aborde le monde comme une construction logique fondée sur un tracé géométrique parfait, reflet de la Raison universelle. On retrouve notamment cette idée chez les penseurs de la Grèce antique et chez les philosophes des Lumières.
La géométrie sacrée rappelle en cela les mathématiques. Mais ici, le code prend forme concrète. Autrement dit, la perfection est non seulement intellectuelle mais aussi réelle et esthétique : l’ordre cosmique se révèle à travers une sorte de beauté visible, universelle.
Esprit et matière
L’expression « géométrie sacrée » allie deux termes, l’un touchant à la matière (géométrie signifie « mesure de la terre ») et l’autre à l’Esprit (« saint » ou « sacré »).
Précisément, la géométrie sacrée établit un lien entre l’abstrait et le concret, entre l’intention et la réalisation. La volonté divine se manifeste à nos sens et à notre esprit : nous percevons enfin l’ordre du monde. Cet ordre, cette perfection, l’Homme tente de les reproduire à travers la peinture, la sculpture, l’architecture ou encore la musique.
De manière plus générale, la géométrie sacrée relie ce qui semble opposé. L’art de tracer est bien l’art de relier, de mettre en correspondance. Les figures géométriques traduisent ce lien, cette interconnection entre toutes ces choses qui constituent la trame cosmique.
La géométrie sacrée : observer, interpréter, créer
Nous l’avons dit, la géométrie sacrée peut se définir comme l’art d’observer (la Nature et ses lois), d’interpréter (les formes géométriques) et de créer (des éléments ou des constructions qui reflètent l’ordre universel).
1) Observer
La géométrie sacrée met en lumière des formes et des motifs récurrents au sein de la Nature, que l’on peut retrouver dans la structure des atomes et des molécules, les systèmes stellaires, les spirales des coquillages, la structure des cristaux, les schémas de croissance des plantes, la symétrie des corps animaux ou encore la structure du corps humain.
Il s’agit donc d’observer la matière et le phénomène vivant pour tenter d’accéder au plan qui sous-tend la manifestation. Il s’agit aussi de prendre conscience de la force, de l’intelligence et de la beauté qui caractérisent les phénomènes qui nous entourent.
C’est cette observation consciente qui permet d’entrer dans le domaine du sacré. Cette hiérophanie (au sens d’irruption du sacré dans notre vie) donne du sens à notre existence : elle crée un ordre nouveau en nous.
2) Interpréter
La géométrie sacrée est aussi l’art d’interpréter les formes géométriques les plus courantes telles le cercle, le carré, le cube ou le triangle.
C’est l’idée que ces figures forment un langage symbolique et spirituel qu’il convient de décoder.
3) Créer (tracer, élaborer, bâtir)
La géométrie sacrée est enfin l’art de créer et de construire, sur la base de l’observation de la Nature et de la compréhension de ses lois.
Par ses réalisations, l’Homme tente de reproduire, de révéler, de rendre évidente la beauté et la perfection du monde. Il leur rend aussi hommage. Il témoigne à Dieu le niveau de conscience et de sagesse qu’il a atteint.
Ce faisant, c’est aussi lui-même que l’individu construit ou reconstruit.
La géométrie sacrée dans les différentes traditions spirituelles et religieuses
On retrouve les principes de la géométrie sacrée dans la plupart des traditions spirituelles et religieuses :
- en ésotérisme, c’est l’art de décrypter les symboles géométriques. En franc-maçonnerie par exemple, la géométrie apparaît au grade de compagnon à travers la lettre G ; elle est le cadre, la méthode de progression ; elle représente l’art de bâtir ; elle véhicule le vrai et le juste ; elle permet d’approcher l’harmonie cosmique ainsi que les mystères de l’existence,
- dans l’hindouisme et le bouddhisme, on retrouve par exemple les formes géométriques dans les mandalas et les yantras, dont le sens est accessible aux seuls initiés,
- dans le christianisme, les principes de la géométrie sacrée s’expriment dans l’architecture des églises et des cathédrales : rosaces, coupoles, plans en croix, etc. On les retrouve aussi dans les symboles trinitaires, dans les proportions des icônes et dans l’art sacré en général, y compris la musique,
- dans l’Islam, la géométrie est l’une des formes les plus puissantes de l’art sacré, visible dans les mosquées et les médersas (écoles coraniques). Les compositions ornementales combinent principalement le cercle, le carré et le triangle, révélant une créativité et une beauté sans limites, reflétant entre autres les principes de l’idéalisme platonicien :
Objets et symboles de la géométrie sacrée
Parmi les objets et symboles les plus célèbres de la géométrie sacrée, citons :
- les solides de Platon : ce sont les cinq polyèdres identifiés dès l’Antiquité. Selon Platon, Dieu a créé le monde et les éléments sur la base de ces cinq formes géométriques,
- le sceau de Salomon : symbole d’union des principes opposés,
- la fleur de vie,
- la Merkaba,
- le cube de Métatron,
- les mandalas,
- le triangle d’or,
- le mystère du nombre d’or,
- le mystère de la quadrature du cercle,
- le principe de la symétrie,
- le delta lumineux,
- le lemniscate,
- le triskel,
- le taijitu (symbole du yin et du yang),
- les différents types d’étoiles,
- les différentes types de croix,
- et l’ensemble des figures géométriques remarquables telles le triangle, le carré, le losange, l’ellipse, le pentagone, l’hexagone, l’octogone, le cercle, la sphère, etc.
Citons aussi quelques réalisations que l’on peut relier à la géométrie sacrée :
- l’homme de Vitruve (Léonard de Vinci),
- les illustrations de Léonard de Vinci pour le traité mathématique De divina proportione de Luca Pacioli,
- les pyramides d’Egypte,
- les temples hindous et bouddhistes,
- les temples grecs (le Parthénon d’Athènes par exemple),
- les grandes mosquées,
- les monuments les plus célèbres de l’Islam tels le Dôme du Rocher (octogonal), la Kaaba (cubique) ou encore le Taj Mahal,
- les églises, chapelles et cathédrales gothiques,
- les axes historiques et les alignements sacrés tels ceux de Stonehenge ou Carnac,
- etc.
Les limites de la géométrie sacrée
La géométrie sacrée exprime un idéal, mais un idéal figé, presque artificiel. Elle est incapable de représenter le réel dans son côté vivant, impermanent, plastique, dynamique.
La Nature est en effet changeante, innovante et aventurière. La symétrie observée chez les êtres vivants n’est jamais parfaite. Les lignes ne sont jamais droites, les cercles jamais vraiment fermés. Les cycles se dérèglent, les astres finissent par dévier de leur trajectoire. Et au final, les lois de la Nature restent mystérieuses et insaisissables.
La géométrie sacrée a donc un côté trop rigide, trop parfait. Par ailleurs, sa manière de représenter la réalité est fondée sur la séparation : en effet, les droites, les courbes et les formes se définissent en ce qu’elles séparent. Or la quête spirituelle implique une autre logique, moins binaire et plus originale, une logique qui réunit et qui englobe. Dans cette perspective, le monde n’est pas une trame ni un réseau, mais un continuum. La séparation qui semble inscrite dans la matière n’est peut-être qu’une apparence : tout est unité.
Dans tous les cas, les symboles et objets de la géométrie sacrée ne doivent pas être vénérés en tant que tels mais utilisés comme de simples outils pour tenter d’approcher l’invisible.
Conclusion
La géométrie sacrée s’inscrit au carrefour des sciences, de l’art, de l’architecture et de la spiritualité. Elle représente la quête de la beauté, de la vérité et de la sagesse.
A travers la géométrie sacrée, l’Homme perçoit, prend conscience, reproduit et rend hommage au Mystère qui sous-tend l’univers. Il déclare se soumettre aux lois cosmiques et ce faisant, s’élève au plus près de Dieu.
Au final, le symbolisme des formes géométriques est un outil qui peut mener à la Connaissance. Mais il ne doit pas être une fin en soi… sous peine de se transformer en obstacle à la « quête ».
Pour aller plus loin :
Qu’est-ce que la spiritualité ? Quel est le but à atteindre ? En quoi consiste la méthode spirituelle ? Quel lien avec la philosophie ?
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Modif. le 20 décembre 2024