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Egalité et humanisme : planche maçonnique

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Egalité et humanisme : quel est le rapport entre ces deux termes ? Comment l’égalité fonde-t-elle l’humanisme ? Voici une planche maçonnique au 1er degré.

Egalité et humanisme sont deux concepts et deux valeurs associées et complémentaires.

En franc-maçonnerie, nous rencontrons l’égalité avec la porte basse. La porte basse agit comme un mètre-étalon : elle nous met tous à égalité, effaçant les différences profanes.

Ce calibrage rappelle la taille de la pierre brute : au-delà des différences, chaque pierre (autrement dit chaque être humain) est destinée à prendre une forme identique aux autres, ce qui permettra leur assemblage et la construction d’un édifice stable.

Une pierre cubique se trouvait cachée dans la matière brute et informe : c’est l’une des significations de l’acronyme V.I.T.R.I.O.L. : « Visite l’intérieur de la Terre, et en rectifiant, tu trouveras la pierre cachée », autrement dit la pierre universelle, cubique, équivalente aux autres.

Cette pierre cachée, c’est donc notre nature commune.

Voici une planche sur égalité et humanisme en franc-maçonnerie.

Lire aussi : Etre humaniste, qu’est-ce que ça veut dire ?

Cette valeur ne va pas de soi tant il est vrai que les inégalités de naissance sont criantes, que ce soit en termes d’origine, de patrimoine, de capacité, de talent, etc. Si l’on considère que les inégalités sont trop grandes, que certaines personnes sont plus utiles que d’autres à la société, alors l’humanisme n’a plus lieu d’être et l’ordre social reposera sur l’inégalité et les privilèges, ce qui aboutira au conflit, à la souffrance et à l’injustice.

Au contraire, la pensée égalitariste et humaniste refuse de reconnaître le pouvoir de ceux qui se croient plus légitimes, plus méritants ou plus intelligents que les autres, car cela ne peut relever que de l’erreur, de l’ambition voire du fanatisme, qui sont précisément les causes des malheurs de l’humanité.

La démarche maçonnique nous aide à déceler ce qui fait de chacun de nous l’égal des autres, au-delà des différences profanes visibles. Elle nous aide à vaincre les passions et les illusions qui pourraient nous faire penser que nous sommes fondamentalement différents, que nous valons mieux (ou moins) que les autres.

Précisément, la taille de la pierre brute consiste à ôter tout ce qui a tendance à nous séparer des autres : le sentiment d’avoir raison, de posséder la vérité, l’impression d’être important ou de ne pas avoir besoin des autres, le sentiment de rejet que nous pouvons éprouver dans certains cas.

Ainsi, le travail maçonnique nous aide à rechercher notre essence commune et universelle, partagée entre nous, membres d’une même loge, mais aussi et surtout entre tous les êtres humains de la planète.

Au premier degré, nous découvrons l’humanisme lors du dernier voyage initiatique : l’épreuve du Feu, qui suit immédiatement l’épreuve de l’Eau.

Le Vénérable Maître le dit, la traversée des flammes permet de faire entrer l’Amour et la charité dans nos cœurs :

Puisse le Feu qui vous a enveloppé se transmuer dans votre cœur en un Amour ardent pour vos semblables, puisse la Charité inspirer désormais vos paroles et vos actions.

Rituel d’initiation au 1er degré REAA

Nous découvrons alors le principe spirituel fondamental : l’Amour. Nous vivons désormais l’expérience dans sa dimension humaniste, c’est-à-dire tournés vers les autres et plus généralement vers l’extérieur, vers le Tout.

Symboliquement, traverser le mur de Feu, c’est mourir. C’est renoncer à soi-même, à son individualité, à son orgueil. C’est lâcher-prise, s’abandonner, se préparer à se sacrifier pour les autres, ce qui permet d’entrer dans un monde nouveau, fait de paix et d’amour.

Ainsi, les flammes permettent une purification intime : nous avons-là une mort physique qui annonce la naissance d’un être défini non plus par son individualité, mais par son universalité.

Le Vénérable Maître rappelle ensuite les principes humanistes fondamentaux, notamment dans cette formule particulièrement forte : « Fais aux autres tout le bien que tu voudrais qu’ils te fassent. »

Autrement dit, notre action devra désormais être guidée par l’exemplarité plus que par la réciprocité : nous devrons montrer la voie sans rien attendre en retour.

En philosophie, l’humanisme est une théorie qui accorde une valeur fondamentale à la personne humaine. C’est l’amour des hommes et de « l’humanité en général », selon les mots du chevalier de Ramsay dans son célèbre discours de 1736 posant les bases de la franc-maçonnerie universaliste.

Ramsay complète : « Le monde entier n’est qu’une grande République, dont chaque nation est une famille, et chaque particulier un enfant. »

Cette définition de l’humanisme en tant qu’amour des hommes peut sembler utopique, tant il semble difficile d’aimer au vu de ce que l’on constate au quotidien : égoïsme, malveillance, haine, conflits, crimes, guerres… S’il est facile d’aimer ceux qui nous respectent et nous veulent du bien, il semble contre-nature d’aimer les autres.

Pourtant, quelque soit l’état du monde, le rituel nous demande de montrer l’exemple. Autrement dit, il nous demande de travailler sur nous-même avant d’exiger quoi que ce soit des autres. C’est toute la puissance de l’approche maçonnique, qui s’écarte en cela de certaines autres traditions, plus moralistes. En l’occurrence, il s’agit de se remettre en question soi-même avant de faire la leçon aux autres.

Cela consiste d’abord à lutter contre nos mauvais penchants qui consistent, au quotidien, à considérer que les autres sont mal intentionnés, et donc à les critiquer. Il ne s’agit plus de juger, ni de séparer ce qui est bien de ce qui est mal, ni de trier entre les bons et les méchants, mais de comprendre l’origine des problèmes et des conflits. Car tout comportement résulte d’une série de causes qu’il convient de rechercher et d’analyser.

Et en cherchant bien, il se pourrait que parmi les causes des dysfonctionnements de la société, il y ait nous-même… Le franc-maçon est lucide sur lui-même, sur ses propres faiblesses, sur son goût pour la facilité. Il sait qu’il lui est facile de juger, et bien plus difficile de comprendre et d’agir. Nécessaire retour sur soi-même donc, avant de se livrer à des jugements de valeur.

Citons le rituel du 1er degré : « Nous travaillons sans relâche à notre amélioration ». Voilà donc l’objectif premier : travailler sur soi-même.

Une société anti-humaniste considère que tout problème vient des hommes. Elle fait donc la chasse aux individus eux-mêmes. Au contraire, une société humaniste s’attaque aux causes des comportements, en agissant sur la prévention, l’éducation et le soin.

Autrement dit, une société humaniste luttera, entre autres, contre la pauvreté, le déclassement et la délinquance, mais elle ne luttera pas contre les pauvres, les faibles ou les déclassés. Cette nuance est fondamentale, elle constitue le socle de nos valeurs. Elle transparaît dans la célèbre citation de Sénèque : « Le bon juge s’applique à condamner le crime sans condamner le criminel ».

Précisons que l’humanisme n’est pas une faiblesse : il ne s’agit pas d’excuser les comportements ni de laisser-faire, mais au contraire de faire en sorte que ces comportements-là n’aient plus lieu à l’avenir, en les traitant à la racine, avec toute la force, l’implication et la rigueur nécessaires. Car une société humaniste est avant tout une société d’engagement.

Le contraire de l’humanisme est la misanthropie, c’est-à-dire la haine du genre humain. On pourrait aussi parler de mépris, de rejet ou encore de racisme. Mais un autre terme contraire, plus adapté, pourrait être ignorance, en l’occurrence l’ignorance des causes des phénomènes et des problèmes qui nous entourent.

Ne pas comprendre les causes conduit à haïr, à exclure, à considérer les autres comme mal intentionnés par nature. Au contraire, rechercher et connaître les causes permet de s’attaquer durablement aux désordres afin d’instaurer une paix durable.

Le comportement humaniste est donc fondé sur la raison, sur la science, sur l’étude, sur la connaissance de soi et des autres, sur l’ouverture de la conscience plutôt que sur une morale binaire qui juge aveuglément en bien et en mal.

Cette pratique de la justice humaniste demande beaucoup de travail et une remise en cause permanente. Faire l’effort de comprendre permet d’instaurer la paix en soi-même, condition indispensable pour œuvrer positivement dans le monde profane. Car c’est bien là notre objectif : porter à l’extérieur la Lumière reçue à l’intérieur. L’engagement et l’exemplarité constituent le moyen de porter cette Lumière.

Les misanthropes et les anti-humanistes pensent que la haine peut faire société. Mais en rejetant les autres, ils se rejettent eux-mêmes. En pensant se protéger, ils nourrissent les conflits. En refusant de s’ouvrir et de comprendre, ils se mettent eux-mêmes en danger et provoquent le chaos.

Mes Frères, j’ai souhaité présenter cette planche parce que je constate un recul flagrant et rapide de l’humanisme dans notre société ces derniers temps. Egalité et humanisme sont en recul. Les grandes institutions humanistes de notre société sont en déliquescence. La peur s’installe. La haine s’exprime de plus en plus ouvertement, s’assume, y compris dans les médias. Tout est de la faute des autres. Plus personne ne se remet en question. L’extrême-droite progresse partout, et les humanistes se retrouvent eux-mêmes qualifiés d’extrêmistes…

Face à cette inversion des valeurs, le franc-maçon a le devoir de réagir. La tâche est immense et notre responsabilité est lourde !

Voir aussi notre liste de planches au 1er degré

Pour aller plus loin :

Les essentiels du premier degré maçonnique couverture

Ce livre numérique pdf (114 pages) comporte 33 planches essentielles pour approfondir les thèmes et symboles du premier degré maçonnique.

Il offre des points d’appui dans le labyrinthe des objets et concepts à décrypter.

Modif. le 7 juin 2024

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