La corde à noeuds : planche maçonnique. Que symbolise la corde à noeuds ? Quel lien avec le fil d’Ariane ? Interprétation au 1er degré.
Quel lien entre la corde à nœuds et le fil que donna Ariane à Thésée pour que ce dernier puisse retrouver son chemin, dans le labyrinthe de Dédale, une fois le Minotaure vaincu ? Tentons d’approcher le rapport entre ce mythe grec et un symbole aussi fort que celui de la corde à nœuds, qui nous entoure, nous embrasse, voire auréole nos têtes. Ce, d’autant qu’à titre pratique une corde n’est pas un fil !
Sur les colonnes, à l’orient et même à l’occident, la corde à nœuds ne peut échapper à notre regard. Elle est ce qui nous sépare de la voûte étoilée. Elle symbolise, à cet égard, la jonction entre le monde fini et l’espace infini, et donc le lien entre le matériel et le spirituel.
Mais sa position entre le nadir et le zénith n’est pas le seul indice qui puisse nous pousser à y déceler ce rôle d’intermédiaire. Si on la regarde plus en détails, on remarquera qu’elle est composée de douze nœuds, qu’elle entoure la loge et qu’elle est ouverte à l’occident en ce que chacune de ses extrémités s’arrêtent ou démarrent sur les colonnes Boaz et Jakin.
Entrons plus profondément dans le symbolisme de la corde à noeuds au 1er degré maçonnique.
Voir aussi notre liste de planches au premier degré
La corde à noeuds : interprétation
Suivre la corde à nœuds nous amène à faire le tour de la loge, de partir de l’occident pour y revenir, mais pas exactement au même point.
Ce symbole est donc une invitation à parcourir le chemin qu’est le voyage initiatique, mais il nous prévient aussi que ce parcours ne sera pas linéaire. Les lacs indiquent aux franc-maçons que, pour avancer, il est parfois indispensable de revenir sur ses pas, non pas en reculant mais plutôt en prenant du recul, en revenant par un autre biais au point sur lequel nous sommes déjà passés.
Cela, sans pour autant perdre de vue l’objectif ! Les lacs incitent donc les maçons à avancer mais, par ce mouvement en huit, à se concentrer et à mener une réflexion sur le chemin parcouru pour repartir de plus belle. En ce sens, les nœuds de la corde offrent l’opportunité de changer de paradigme et donnent un regard neuf sur un endroit que nous avons déjà découvert pour le redécouvrir à nouveau et percer ses mystères.
Pour s’en convaincre, il suffit de penser à cette loge au sens de bâtiment. C’est la matrice même de nos travaux, nous y revenons aussi régulièrement que possible. Mais, passer du septentrion au midi, et inversement, permet de changer de regard, de donner une nouvelle perspective.
Il n’en reste pas moins qu’en suivant le chemin qui s’offre à nous, au travers de la méthode (du grec methodos signifiant recherche d’une voie), le voyage nous fait partir de la colonne Boaz pour arriver à la colonne Jakin et ainsi de suite.
Bis repetita placent ! La répétition est perpétuelle, à l’image de la Terre qui – quoi que l’Homme en pense – ne s’arrêtera pas de tourner.
Il n’en demeure pas moins que le temps qui nous aura été nécessaire pour faire cette révolution de B:. à J:. ne reviendra jamais, et l’apprenti qui aura fait le premier pas pour contourner le pavé mosaïque ne sera plus tout à fait le même lorsqu’il aura terminé sa course.
Durant ce tour que permet le Rite, qui est avant tout sur soi-même, nous descendons en nous pour en remonter et nous pouvons nous servir de la corde à nœuds, ce symbole qui nous est offert tel un fil d’Ariane.
Du fond, et si on lève les yeux, restera toujours cette voûte emplie d’étoiles pour nous servir, tels des marins, de repères ou de repaires. Il est d’ailleurs émouvant de se dire que nos ancêtres, quelles que furent leurs conditions et épreuves, ont observé les mêmes étoiles que nous, ce que feront aussi les générations futures.
La corde à noeuds, le temps et l’espace
Bercé par la vue des étoiles, l’apprenti n’en est pas moins emporté par ce temps qui court et s’écoule entre ses doigts. Cette corde à noeuds nous le rappelle, au travers de ses douze lacs d’amours qui peuvent représenter les douze mois de l’année, les signes du zodiaque, ou les quatre saisons, chacune composée de trois mois. Il existe donc une continuité, une union temporelle, entre ce qui a été, ce qui est et ce qui sera.
Cette temporalité n’en est pas moins vraie pour ce qui est de la franc-maçonnerie. Bien qu’universelle, elle n’en est pas moins ancrée dans la tradition exprimée par le Rite qui nous oblige à honorer la mémoire de nos frères qui l’ont composé, perfectionné et pratiqué.
Par ce lien invisible venu de la profondeur des âges, le Rite nous a conduit ici, en ce lieu sacré, pour nous y retrouver, ensemble, et y pratiquer nos travaux. C’est parce que nos aïeux ont exprimé le souhait de se considérer comme frères, et ont agi comme tels, que nous pouvons, à notre tour, faire de même.
En ce sens, on pourrait déjà considérer que la corde à nœuds est un « fil d’Ariane » car elle nous permet, symboliquement, de nous repérer dans le temps mais aussi, on l’a vu, dans l’espace qu’est la loge.
Or, l’erreur serait de s’arrêter aux caractéristiques visibles de ce lieu pour en conclure que celui-ci n’est qu’un carré long, de sorte que la corde ne ferait « que » le tour de celui-ci. La problématique est bien plus complexe car ce que renferme la loge est le Tout !
Ses dimensions n’ont en soi pas de limite car elle s’étend de l’occident à l’orient, du septentrion au midi et du nadir au zénith. C’est un espace où le terme frontière n’existe pas, si ce n’est peut-être la porte qui nous sépare du monde profane…
La corde à noeuds et le labyrinthe de l’existence
L’Homme évolue dans un labyrinthe matériel et mental. Difficile d’y voir clair parmi les faits, les évènements et les pensées qui nous assaillent. C’est en ce sens que la corde à noeuds prend toute son importance.
Pour sortir d’un labyrinthe, il existe une technique infaillible, celle qui consiste à avancer sans jamais décoller la main droite du mur droit. Ainsi, on finira par trouver la sortie, même s’il faut pour cela parcourir tout le labyrinthe.
Cette méthode fonctionne parfaitement. De même, parcourir la corde à noeuds du doigt permet de ne jamais se perdre dans les nœuds ou « lacs d’amour ». Il ne faut donc jamais se détacher du cordeau (pour reprendre le terme utilisé par le Rite), afin d’avancer sans se perdre.
Suivre le cordeau permet de ne pas nous perdre dans nos réflexions en loge. Comme cela est maintes fois rappelé, le Rite nous donne les outils pour que nous trouvions nous-même et en nous-même notre propre chemin.
Ce voyage, nous ne le faisons pas seul, mais entourés de nos frères qui seront toujours à notre écoute et à nos côtés pour nous aider à nous guider à chaque fois que cela nous sera nécessaire.
Nous l’avons dit, la corde à noeuds symbolise le lien temporel avec nos frères passés ; mais elle symbolise avant tout le lien avec nos frères présents. Ces lacs d’Amour, outre leur nom, évoquent la fraternité qui peut se dégager lors de la chaine d’union.
La corde à noeuds, symbole de fraternité
Ainsi, la corde à noeuds symbolise le lien indéfectible avec nos frères. En cas de doute, il suffira de tendre la main pour attraper le fil d’Ariane qui nous unit : nous pourrons ainsi retrouver les traces que chacun a laissé de son passage dans l’existence de l’autre.
Cette promesse, nous l’avons matérialisée lors de notre serment : nous avons notamment juré « d’observer consciencieusement les principes de l’Ordre Maçonnique, de travailler à la prospérité de notre Respectable Loge, d’en suivre régulièrement les Travaux, d’aimer nos Frères et de les aider par nos conseils et nos actions. »
Au final, la corde à nœuds n’est pas un carcan dans lequel nous devons évoluer ni une voie imposée. Elle est davantage le symbole de ce que nous choisissons notre propre chemin, notre propre voie mais que, dans le labyrinthe que cette dernière constitue, nous aurons toujours un fil d’Ariane pour ne pas nous perdre. Ce fil, c’est celui qui nous unit aux autres.
Pour aller plus loin :
Ce livre numérique pdf (114 pages) comporte 33 planches essentielles pour approfondir les thèmes et symboles du premier degré maçonnique.
Il offre des points d’appui dans le labyrinthe des objets et concepts à décrypter.
Modif. le 24 juin 2024